Ne jamais séparer les cerises : en conversation avec Lassana Sarre
Sarre s'entretient avec Lara Xenia sur son intérêt pour Frantz Fanon, le portrait et l'importance de la représentation.
Figure 1: Lassana Sarre, Combattre, 2022, acrylique sur toile, 62.99 × 51.18 pouces (160 × 130 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
Lara Xenia: Vous avez mentionné que votre travail était influencé par Manet, Courbet et Velázquez. Où trouvez-vous habituellement votre inspiration ?
Lassana Sarre: Mon inspiration vient de situations réelles, ancrées dans les aspects morphologiques et psychologiques du sujet : ses métaphores, son histoire et la rencontre elle-même. La rencontre avec un sujet à un instant, et à travers l'art visuel, je m'efforce de raconter des histoires qui capturent la tension de cet instant entre moi et une autre forme humaine ou figurative. C'est comme un témoignage, ou une vraie rencontre. Parfois, je pars d'un sujet original, d'un inconnu, et la rencontre n'est qu'un instant bref et fugace. J'essaie de créer une relation organique avec le tableau, car mon intention change lorsque je rencontre un sujet aussi rapidement. Par exemple, lorsque je vivais à New York, dans le Lower East Side, j'ai rencontré un homme devant mon appartement. Nous n'avons parlé que quelques instants, mais j'ai ressenti son intensité.
LX: Intense dans son énergie ou dans son comportement ?
Figure 2: Lassana Sarre, L'homme qui fume, 2025, acrylique sur toile, 62.99 × 51.18 pouces (160 × 130 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LA: Dans son comportement et sa communication. Il parlait très vite, mais il racontait beaucoup d'anecdotes personnelles et sa vision des États-Unis, de New York et de la couleur. J'ai donc décidé de le dessiner dans la rue. C'était cette personne qui est restée là, l'espace d'un instant, dans un format portrait très classique, face à moi. Il est resté immobile pendant peut-être deux ou trois minutes. J'aime appeler cela des marqueurs de mémoire. Je l'ai immortalisé à cet instant. Malheureusement, je n'ai retenu ni son prénom ni son nom.
LX: Ah, intéressant. Pourriez-vous me dire ce qui vous a inspiré pour peindre Frantz Fanon ?
Figure 3: Lassana Sarre, Frantz Fanon, La gravure au temps, 2025, acrylique et fusain sur toile, 62.99 × 51.18 pouces (160 × 130 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LA: Encore une fois, ce sont des peintures de réalité. Je pensais beaucoup aux problèmes sociaux, et pendant mon exposition, je lisais Black Skin, White Masks de Frantz Fanon, qui répond aux questions sur l'avenir. Dans le cadre des recherches autour de la figure noire, j’ai réalisé un hommage allégorique à Jean Amilcar. Enfant sénégalais, il est réduit en esclavage à l’âge de 5 ans et envoyé en France en 1787 pour être le fils adoptif de la reine Marie-Antoinette. Baptisé à Versailles sous le nom de Jean Amilcar, il apprit à lire et à écrire là. Mais après l’arrestation de la reine, il est placé en pension et meurt à 14 ans à l’Hospice de l’Unité à Paris. Alors que je réalisais ce dessin totalement fantomatique, dessiné avec du charbon de bois sur papier; les enfants du quartier qui viennent souvent dans mon studio ont soudainement commencé à m’imiter.
C’est alors que surgit mon inspiration derrière cette peinture Fanon, où figure une pose pyramidale importante congelée sur la toile. Il y avait beaucoup d'idées que je voulais proposer dans l'exposition, alors j'ai continué ma réflexion sur les questions posées par Franz Fanon. Son œuvre a posé des questions extrêmement importantes sur l'avenir des jeunes, de l'oppression, du colonialisme et des relations humaines. Il était également psychanalyste, mais a travaillé dans le domaine médical, j'étais donc curieux de mesurer l'impact que le racisme pouvait avoir sur ce jeune à la fois impuissant et tout-puissant. Le dessin de Frantz Fanon, à droite de la peinture, est presque effacé et fait au crayon. Il est là, figé dans le temps, presque gravé dans la roche.
Figure 4.1: Marie Victoire Lemoine, Portrait d'un jeune homme au gilet brodé (présumé de Jean Amilcar), vers 1785–1790, huile sur toile, 25.5 × 21.4 pouces (64.77 × 54.36 cm), Acheté avec des fonds du Cummer Council (AP.1994.3.1), Cummer Museum of Art and Gardens, Jacksonville, Floride.
Figure 4.2: Lassana Sarre, Jean Amilcar, 2025, fusain sur papier, 39.37 × 27.56 pouces (100 × 70 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LX: C'est comme le formidable apex. De quoi s'agit-il avec ce dessin sur son dos ?
LA: C'est un dessin de Pikachu dans Pokémon [rires]. Pika, qui n'est ni dangereux ni électrique, a une présence contemporaine sur la jeunesse d'aujourd'hui.
LX: Comme c’est drôle. Quelle est l’histoire de L'enfant aux cerises ?
Figure 5: Lassana Sarre, Ne jamais séparer les cerises, 2025, acrylique sur toile, 74.80 × 51.18 pouces (190 × 130 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
Figure 6: Édouard Manet, L’enfant des cerises, vers 1858, huile sur toile, 25.78 × 21.42 pouces (65.5 × 54.40 cm), Calouste Gulbenkian Museum, Lisbon, Portugal (395). Photo: avec l'aimable autorisation du Musée Calouste Gulbenkian © Édouard Manet
LA: Elle s'inspire du Garçon aux cerises d'Édouard Manet (vers 1858), un tableau qui raconte la tragédie d'un jeune enfant pauvre des rues qui a aidé Manet. Ce garçon, Alexandre, était psychologiquement fragile et faisait beaucoup de bêtises, mais lorsque Manet a menacé de le chasser de l'atelier, Alexandre s'est suicidé. Il est mort très jeune par amour de la peinture. Ces deux éléments se rejoignent dans cette composition. Je rends hommage à Édouard Manet en intitulant mon exposition « Enfant aux cerises », car je questionne le pouvoir de la peinture. Manet rend un immense hommage à cet enfant, et je rends également hommage à ma genèse, à mon frère jumeau et à l'amour de la peinture. J'ai également choisi d'utiliser des tons très sombres.
LX: Ah, oui. Je me souviens que « La Corde » (1869) de Baudelaire s’est inspiré de cet incident. Était-ce aussi pour une exposition ?
LA: J'ai commencé ce tableau à la galerie Polaris. J'y ai travaillé pendant un an, puis je suis allé à New York, je suis revenu et je l'ai retravaillé. Il est composé de touches subtiles de couleurs très sombres qui se répandent lentement sur la toile.
LX: Avez-vous beaucoup réfléchi au thème de l'adversité dans votre travail ? Placez-vous souvent vos personnages dans un espace suspendu pour refléter ce sentiment ?
Figure 7: Lassana Sarre, Sans titre, 2023, acrylique sur toile, 62.99 × 51.18 pouces (160 × 130 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LA: Oui. Toute ma pratique aborde la question des tensions sociales et de l'ascension sociale en France. Si l'on considère les tableaux de maîtres anciens et la question du portrait, comme chez Manet ou Ingres, les peintres représentent toujours la haute société, comme la royauté, la haute bourgeoisie et les riches. Ils ont toujours pensé au confort et représenté des personnages très posés dans des environnements somptueux. J'essaie de défier cela en capturant mes sujets comme flottants, pour évoquer l'ascension sociale. Soit ils flottent, soit ils atteignent une certaine élévation sociale, mais l'absence de chaise évoque cette idée. C'est censé être introspectif.
LX: C’est fascinant de constater que l’effacement des meubles dans ta composition lui ajoute autant de puissance psychologique. J'aimerais aussi en savoir plus sur L’Homme à la larme sur votre récente exposition au Musée du Val-de-Marne.
J'essaie de défier cela en capturant mes sujets comme flottants, pour évoquer l'ascension sociale.
LA: Oui. J'ai commencé à peindre ce tableau en octobre 2023, puis je suis allé à New York. L'Homme à la larme était une observation sur la violence, car j'étais profondément touché par la brutalité mondiale. C'était cette tension, cet entre-deux que l'on ressentait face à la violence. Les artistes ont toujours parlé de la violence dans le monde, de Guernica à Géricault. C'est un quasi-autoportrait, mais ce n'en est pas vraiment un, car il me représente très âgé. Il parle beaucoup de l'espace-temps et du poids de la violence sur le vieillissement de l'âme. Avec une seule larme, j'ai essayé d'imiter cela en la faisant s'estomper dans cette peinture ocre et terreuse. Les teintes évoquent aussi les briques que l'on peut voir à New York. J'ai été inspiré par tout cela.
Figure 8: Lassana Sarre, L'homme à la larme, 2025, acrylique sur toile, 74.80 × 62.99 pouces (190 × 160 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LX: L'homme est aussi un peu aveugle, non ?
LA: Oui, absolument. C'est une image réelle, inspirée par mon père, qui est borgne. Pour tous mes personnages, je le recrée physiquement. La pupille, ou le regard, est l'un des éléments les plus importants du portrait. J'explore la relation entre le réel et le regard borgne, le visible et le caché. Ce sont des préoccupations classiques pour moi, qui invitent le spectateur à regarder le tableau avec sincérité.
LX: Très intéressant. Je suis également curieuse d’en savoir davantage sur le diptyque Dualité de la paresse et violence des caresses. Pourquoi avoir choisi ce format et cette teinte jaune ? S'agit-il d'un ballon dans la composition ?
Figure 9: Vues de l’exposition « Forever Young » du 14 juin 2025 au 4 janvier, 2026, Musée d’art contemporain du Val-de-Marne (MAC VAL), Vitry-sur-Seine, France. Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste et Aurélien Mole © Adagp, Paris 2025, Aurélien Mole
LA: Oui. Ce tableau mesure deux mètres et demi sur trois. J'imaginais la Porte de la Liberté comme un hommage à la jeunesse et aux Noirs de France. C'est une sorte d'expérimentation, car je n'ai pas fini de dessiner le ballon ; c'est de l'imagination. Il représente l'idée de voler, comme un geste de liberté. Celui de gauche se trouve à La Madeleine, à Paris. Le jaune fait référence à Nahel Merzouk, un jeune Français qui conduisait sans permis et a été tragiquement tué par un policier. Sa mort a fait sensation en France. Nahel conduisait une Mercedes AMG jaune ; j'ai donc choisi ce jaune pour refléter la violence et la catastrophe de l'histoire. En conceptualisant le jaune et la violence, mon assistant d'atelier et moi avons décidé d'utiliser cette couleur pour symboliser les deux. Pour la jeune fille du tableau, j'ai transformé l'image d'Assa en une fille aux cheveux bleus. Assa habite dans le quartier près de mon atelier et adore dessiner dans la rue et jouer dehors.
J'explore la relation entre le réel et le regard borgne, le visible et le caché.
Dans ce dessin, je voulais la montrer en train de créer avec une fleur de rue plutôt qu'avec un crayon. Elle a choisi des fleurs rouges, appelées Obsalis Trianglealis, qui sont fortes et belles. Je lui ai demandé : « Puisque tu es jeune, que tu aimes dessiner et que tu assumes tes responsabilités( réaliser dans la rue, pourrais-tu dessiner une fleur dans mon tableau en utilisant une vraie fleur plutôt qu'avec de la peinture ? » Parce qu'elle représente l'avenir de l'art et voit la vie avec profondeur et liberté. Elle a essayé, en dessinant la fleur avec la fleur elle-même. Organique, elle est temporaire et éphémère, s'estompant avec le temps. Au musée, le jaune représente la violence, en hommage au jeune garçon et en réflexion sur les violences policières en France. Parallèlement, elle a dessiné la fleur qui disparaît et j'ai peint une grande image d'elle s'envolant et s'émancipant. C'est donc une dualité de séparation et de tendresse, une dualité de peintures qui n'est pas tout à fait un diptyque, mais qui reste néanmoins connecté.
LX: Mais c'est aussi magnifique que ce soient des membres de votre communauté que vous montrez. Même la façon dont vous l'avez mis en forme, avec un petit cercle et les chaînes, est intéressante. Attends, vous êtes si chanceux d'être entouré de tous ces enfants.
LA: Oui [rire].
LX: La femme dans Songe d'êtres Toujours me semble vraiment familière.
Figure 12: Lassana Sarre, Songe d'être toujours, 2025, acrylique sur toile, 47.24 × 31.5 pouces (120 × 80 cm). Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LA: Oui. Ce tableau est inspiré d'une photo emblématique de Maya Angelou, que j'ai retravaillée. C'est un hommage à une femme qui a inspiré penseurs et intellectuels outre-Atlantique. L'œuvre a été commandée par une femme, et comme je peins rarement des femmes, c'est pour moi une rupture significative. Mon travail se concentre souvent sur la réalité et la violence des hommes, mais j'essaie à chaque fois d'adoucir ces figures. J'étudie souvent la peinture et j'aime intégrer les mouvements artistiques existants dans mon travail pour me positionner dans l'histoire de l'art et maintenir un lien institutionnel important.
LX: De quoi êtes-vous fier, dans la vie ou dans votre art ?
LA: Je ne suis pas fier de ce monde et de sa violence [rires]. Mais la peinture est un reflet de moi-même, et je suis fier de découvrir un nouveau geste à chaque évolution de l'œuvre. Je peins ma réalité, parfois simplement en me fiant à la peinture et aux tons noirs. Quand on dit que c'est noir, ce n'est pas seulement noir; c'est une métaphore du corps et de mon expérience de vie.
LX: Je voulais également poser une question sur Le reflet dans l'air.
Figure 13: Lassana Sarre, Le reflet dans l'air, 2024, EX-AEQUO, Fonds d'art contemporain de la Ville de Paris. Photo: avec l'aimable autorisation de l'artiste © Lassana Sarre
LA: Oui. Cette œuvre, commandée par le Fonds d'art contemporain de Paris pour les Jeux Olympiques, rend hommage à une grande athlète nommée Marie-José Perec. Elle fut la première femme noire à obtenir un score exceptionnel aux Jeux olympiques. Il est très important pour moi de lui rendre hommage.
LX: Super cool. Idéalement, où se situerait votre exposition, si vous pouviez en organiser une?
LA: Je ne sais pas, peut-être dans dix ans vingt ou 30, au MoMA. Ce n'est pas la fin de ma vie, mais c'est vraiment important pour moi de faire partie de la plus grande institution du monde. Je pense que ce serait magnifique.
Photo: avec l'aimable autorisation de Maurine Pret © Maurine Pret et Conversarting
Lassana Sarre
Lassana Sarre (né en 1994 à Paris, France) est un artiste plasticien et portraitiste né à Paris et élevé à Vitry-sur-Seine. Son parcours artistique s'ancre dans une quête perpétuelle de réinvention des récits historiques et des représentations identitaires. Diplômé des Beaux-Arts de Nice et de la Villa Arson des Beaux-Arts de Paris, il s'inspire des grands maîtres de la peinture occidentale tels que Vélasquez, Courbet et Manet. Son œuvre s'affranchit des cadres rigides pour établir un dialogue critique avec l'histoire de l'art. Il place le corps noir au centre de compositions où mémoire collective, résistance et introspection individuelle s'entremêlent dans une tension à la fois esthétique et conceptuelle. Son travail, marqué par un jeu constant entre présence et effacement, propose une réinterprétation des codes classiques tout en explorant les enjeux sociaux et politiques contemporains.
Chaque toile devient un espace de réflexion, où les silences du passé se confrontent aux exigences d'un avenir pluriel. Lassana Sarre transcende les frontières artistiques en réintégrant le corps noir dans des récits visuels qui rejettent l'objectification et célèbrent sa complexité. En ré-interprétant des poses classiques et en intégrant des éléments minimalistes, il crée des œuvres dont la sobriété visuelle renforce l'impact conceptuel. Il appartient à une génération d'artistes qui ne se contentent pas de revisiter le passé, mais le transforment en matière vivante, un prisme à travers lequel prend forme une esthétique résolument contemporaine, consciente et visionnaire. Influencé par le graffiti, il n'hésite pas à marquer ses gestes, mettant en valeur des éléments éloquents. Sarre vit et travaille à Paris.
Never Separate The Cherries: In Conversation with Lassana Sarre
Sarre speaks with Lara Xenia about his interest in Frantz Fanon, portraiture, and the importance of representation.
Figure 1: Lassana Sarre, Battling, 2022, acrylic on canvas, 62.99 × 51.18 inches (160 × 130 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
Lara Xenia: You’ve mentioned that your work is inspired by Manet, Courbet, and Velázquez. What else do you get inspired by?
Lassana Sarre: My inspiration comes from real situations, rooted in the morphological and psychological aspects of the subject, like its metaphors, its history, and the encounter itself. The encounter with a subject is a moment in time, and through visual art, I strive to tell stories that capture the tension of that moment between me and another human or figurative form. It's like a testimony, or a real encounter. Sometimes I start with an original subject, like a stranger, and the encounter is only a brief, fleeting moment. I try to create an organic relationship with the painting because my intention changes when the encounter is so quick. For example, when I lived in New York City, on the Lower East Side, I met a man outside my apartment. We only spoke for a few moments, but I felt his intensity.
LX: Intense in his energy or in his behavior?
Figure 2: Lassana Sarre, The Smoking Man, 2025, acrylic on canvas, 62.99 × 51.18 inches (160 × 130 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LA: In his attitude and his communication. He spoke very rapidly, but he shared many personal anecdotes and his vision of the United States, New York, and color, so I decided to draw him in the street. It was this person who was there, facing me for a moment, in a very classic portrait format. He remained motionless for maybe two or three minutes. I like to call these memory markers. I immortalized him in that moment. Unfortunately, I couldn't remember his first or last name.
LX: Wow, interesting. Could you tell me what inspired you to paint Frantz Fanon?
Figure 3: Lassana Sarre, Frantz Fanon, Engraving in Time, 2025, acrylic and charcoal on canvas, 62.99 × 51.18 inches (160 × 130 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LA: Again, these are paintings that are based on reality. I've been thinking a lot about social issues, and during my exhibition, I was reading Frantz Fanon's Black Skin, White Masks, which addresses questions about the future. As part of my research on the Black figure, I made an allegorical tribute to Jean Amilcar. He was a Senegalese child who was enslaved at the age of 5 and sent to France in 1787 to be the adopted son of Queen Marie-Antoinette. He was baptized at Versailles under the name Jean Amilcar, where he learned to read and write. But after the queen's arrest, he was placed in a boarding school and died at the Hospice de l'Unité in Paris at the age of 14. While I was making this completely eerie drawing using charcoal on paper, the local children who often come to my studio suddenly started imitating me.
This is when my inspiration for this large pyramidal Fanon painting came to me. There were many ideas I wanted to present in the exhibition, so I continued my reflection on the questions posed by Franz Fanon. His work posed extremely important questions about the future of young people, oppression, colonialism, and human relationships. He was also a psychoanalyst, but worked in the medical field, so I was curious to measure the impact that racism could have on this young man, who was both powerless and all-powerful. The drawing of Frantz Fanon, on the right of the painting, is almost erased and done in pencil. It is there, frozen in time, almost etched in stone.
Figure 4.1: Marie Victoire Lemoine, Portrait of a Young Man in an Embroidered Vest (presumed to be Jean Amilcar), c. 1785–1790, oil on canvas, 25.5 × 21.4 inches (64.77 × 54.36 cm), Purchased with funds from the Cummer Council (AP.1994.3.1), Cummer Museum of Art and Gardens, Jacksonville, Florida.
Figure 4.2: Lassana Sarre, Jean Amilcar, 2025, charcoal on paper, 39.37 × 27.56 inches (100 × 70 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LX: It's like a great apex. What's that drawing on its back about?
LA: It's a drawing of Pikachu from Pokémon [laughs]. Pikachu, who isn't dangerous or electric, has a contemporary presence among today's youth.
LX: How funny. What's the story behind Never Separate the Cherries?
Figure 5: Lassana Sarre, Never Separate the Cherries, 2025, acrylic on canvas, 74.80 × 51.18 inches (190 × 130 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
Figure 6: Édouard Manet, Boy with Cherries, c. 1858, oil on canvas, 25.78 × 21.42 inches (65.5 × 54.40 cm), Calouste Gulbenkian Museum, Lisbon, Portugal (395). Photo: courtesy the Calouste Gulbenkian Museum © Édouard Manet
LA: It's inspired by Édouard Manet's Boy with Cherries (c. 1858), a painting that tells the tragedy of a young, poor street child who helped Manet. This boy, Alexandre, was psychologically fragile and got into a lot of mischief, but when Manet threatened to throw him out of the studio, Alexandre committed suicide. He died very young for the love of painting. These two elements come together in this composition. I pay homage to Manet by titling my solo exhibition "Child with Cherries" because I wanted to question the power of painting. Manet pays a huge tribute to this child, and I also wanted to honor my genesis and allegiance to my twin brother, and to this grand love of painting. I chose to use very dark tones throughout.
LX: Oh, I see. I remember that Baudelaire’s “The Rope” (1869) was inspired by that incident. Was that also for an exhibition?
LA: I started this painting at Polaris Gallery. I worked there for a year, then went to New York, came back, and reworked it. It's composed of subtle touches of very dark colors that slowly spread across the canvas.
LX: Have you thought much about the theme of adversity in your work? Do you often place your figures in a suspended space to reflect this feeling?
Figure 7: Lassana Sarre, Untitled, 2023, acrylic on canvas, 62.99 × 51.18 inches (160 × 130 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LA: Yes. My entire practice addresses the question of social tensions and upward mobility in France. If you look at Old Master paintings and the question of portraiture, like Manet or Ingres, painters always depicted high society, such as royalty and the upper middle class. They always thought about the notion of comfort and depicted very poised figures in sumptuous environments. I try to challenge this by rendering my subjects as floating figures, to suggest their social ascension. They're either floating or they're achieving a certain social elevation, but the absence of a chair conjures this idea. It's meant to be introspective.
LX: It's fascinating to see how the removal of furniture in your composition adds so much psychological power to it. I'd also like to know more about Man with a Tear at your recent exhibition at the Musée du Val-de-Marne.
I try to challenge this by rendering my subjects as floating figures, to suggest their social ascension.
LA: Yes. I started painting this picture in October 2023, and then I went to New York. Man with a Teardrop was an observation on violence, as I was deeply affected by global brutality. It was this tension, this in-betweenness that one feels in the face of violence. Artists have always spoken about violence in the world, from Guernica to Géricault. It's almost a self-portrait, but it's not really one, because it depicts me at a very old age. It speaks a lot about space-time and the weight of violence on the aging soul. With a single teardrop, I tried to imitate that by making it fade into this earthy, ochre painting. The hues also are reminiscent of the bricks that you can see in New York. I was inspired by all of that.
Figure 8: Lassana Sarre, Man with a Tear, 2025, acrylic on canvas, 74.80 × 62.99 inches (190 × 160 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LX: The man is also a little blind, isn't he?
LA: Yes, absolutely. It's inspired by a real image of my father, who is one-eyed. For all my characters, I physically recreate him. The pupil, or the gaze, is one of the most important elements of the portrait. I explore the relationship between the real and the one-eyed gaze, the visible and the concealed. These are classic concerns for me, inviting the viewer to look at the painting with sincerity.
LX: Very interesting. I'm also curious to know more about the diptych Duality of Laziness and Violence of Caresses. Why did you choose this format and this yellow tint? Is it a balloon in the composition?
Figure 9: Views of the exhibition “Forever Young” from June 14, 2025 to January 4, 2026, Musée d’art contemporain du Val-de-Marne (MAC VAL), Vitry-sur-Seine, France. Photo: courtesy the artist and Aurélien Mole © Adagp, Paris 2025, Aurélien Mole
LA: Yes. This painting measures two-and-a-half meters by three. I imagined the Gate of Liberty as a tribute to the youth and the Black people of France. It's an experiment because I didn't finish drawing the balloon; it's imagined. It represents the idea of flying, as a gesture of freedom. The one on the left is at La Madeleine, in Paris. The yellow refers to Nahel Merzouk, a young Frenchman who was driving without a license and was tragically killed by a police officer. His death caused a sensation in France. Nahel was driving a yellow Mercedes AMG; so I chose this yellow to reflect the violence and catastrophe of the story. In conceptualizing yellow and violence, my studio assistant and I decided to use this color to symbolize both. For the young girl in the painting, I transformed Assa's image into a girl with blue hair. Assa lives in the neighborhood near my studio and loves to draw in the street and play outside.
I explore the relationship between the real and the one-eyed gaze, the visible and the concealed.
In this drawing, I wanted to show her creating with a street flower rather than a pencil. She chose red flowers, called Obsalis Trianglealis, which are strong and beautiful. I asked her, "Since you're young, you like to draw, and you take responsibility in making works in the street, could you draw a flower in my painting using a real flower rather than paint?" Because she represents the future of art and sees life with depth and freedom. She tried, drawing the flower with the flower itself. Since it’s organic, it is temporary and ephemeral, and fades over time. In the museum, the yellow represents violence, as a tribute to the young boy and a reflection on police brutality in France. At the same time, she drew the disappearing flower, and I painted a large image of her flying away and emancipating herself. So it's a duality of separation and tenderness, a duality of paintings that isn't quite a diptych, but nonetheless retains that connection.
LX: But it's also beautiful that you're showing members of your community. Even the way you shaped it, with a small circle and the chains, is interesting. Wait, you're so lucky to be surrounded by all these children.
LA: Yes [laughs].
LX: The woman in Songe d'êtres Toujours looks really familiar to me.
Figure 12: Lassana Sarre, Songe d'êtres Toujours, 2025, acrylic on canvas, 47.24 × 31.5 inches (120 × 80 cm). Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LA: Yes, this painting is inspired by an iconic photograph of Maya Angelou, which I reworked. It's a tribute to a woman who inspired thinkers and intellectuals across the Atlantic. The work was commissioned by a woman, and since I rarely paint women, it's a significant departure for me. My work often focuses on reality and the violence of men, but I always try to soften these figures.
LX: What are you proud of, in life or in your art?
LA: I'm not proud of this world and its violence [laughs]. But painting is a reflection of myself, and I'm proud to discover a new gesture with each evolution of the work. I paint my reality, sometimes simply relying on paint and dark tones. When we say it's black, it's not just black; it's a metaphor for the body and my life experience.
LX: I also wanted to ask a question about The Reflection in the Air.
Figure 13: Lassana Sarre, Reflection in the Air, 2024, EX-AEQUO, Contemporary Art Fund of the City of Paris. Photo: courtesy the artist © Lassana Sarre
LA: This work, commissioned by the Fonds d'art contemporain de Paris for the Olympic Games, pays tribute to a great athlete named Marie-José Perec. She was the first Black woman to achieve the highest score at the Olympic Games. It's very important to me to honor her. It was as if the Phrygian cap unfolded like a dancer, reflecting the change of guards…that victory was significant for me to memorialize.
LX: Super cool. Ideally, where would your exhibition be located, if you could organize one?
LA: I don't know, maybe in 10, 20, or 30 years, at MoMA. It's not the end of my life, but it's really important to me to be part of the greatest institution in the world. I think it would be magnificent.
Photo: courtesy Maurine Pret © Maurine Pret and Conversarting
Lassana Sarre
Lassana Sarre (born 1994 in Paris, France) is a visual artist and portraitist born in Paris and raised in Vitry-sur-Seine. His artistic career is rooted in a perpetual quest to reinvent historical narratives and representations of identity. A graduate of the Beaux-Arts de Nice and the Villa Arson des Beaux-Arts in Paris, he draws inspiration from the great masters of Western painting such as Velázquez, Courbet, and Manet. His work breaks free from rigid frameworks to establish a critical dialogue with art history. He places the Black body at the center of compositions where collective memory, resistance, and individual introspection intertwine in a tension that is both aesthetic and conceptual. His work, marked by a constant interplay between presence and erasure, offers a reinterpretation of classical codes while exploring contemporary social and political issues.
Each canvas becomes a space for reflection, where the silences of the past confront the demands of a plural future. Lassana Sarre transcends artistic boundaries by reintegrating the Black body into visual narratives that reject objectification and celebrate its complexity. By reinterpreting classic poses and incorporating minimalist elements, he creates works whose visual sobriety reinforces their conceptual impact. He belongs to a generation of artists who do not simply revisit the past, but transform it into living matter, a prism through which a resolutely contemporary, conscious, and visionary aesthetic takes shape. Influenced by graffiti, he does not hesitate to mark his gestures, highlighting eloquent elements. Sarre lives and works in Paris.